top of page
Photo du rédacteurFabien Bourgeonnier

Pourquoi chercher une aide psychologique après un drame ? Témoignage d’un père ayant perdu son fils.

Introduction : Un drame inimaginable

Le 14 décembre 2017, ma vie a basculé. Ce jour-là, mon fils aîné a perdu la vie dans le drame de Millas, lorsque son car scolaire a été percuté par un TER. Tout a changé en quelques heures : un appel de ma femme, une bande d’information terrifiante à la télévision annonçant une "collision terrible", et mon arrivée précipitée sur les lieux du drame.


Sur place, l’horreur était palpable : des sacs mortuaires, des regards fuyants de la part de mes anciens collègues sapeurs-pompiers, et un silence qui en disait long. Ce n’est qu’à la salle communale, en croisant le regard de mon ancien chef de centre, que la terrible réalité s’est imposée : mon fils n’était plus parmi nous. L’annonce formelle, faite des heures plus tard dans une salle froide et impersonnelle de l’hôpital, fut brutale et inhumaine : « Asseyez-vous, c’est terminé. »


Ces instants marquent une vie à jamais. Mon premier sentiment fut une envie immédiate de rejoindre mon fils, comme si tout s’arrêtait autour de moi. Pourtant, un mélange de colère, de douleur, et d’un inexplicable instinct de combat a commencé à germer. C’est cet instinct, renforcé par les soutiens reçus et les aides que j’ai cherché par la suite, qui m’a permis de survivre et de me battre pour la mémoire de mon enfant.


L’impact d’un drame sur une vie : tout s’arrête


L’annonce de la perte d’un enfant n’est pas seulement un choc émotionnel : c’est un tsunami qui emporte tout sur son passage. Pour moi, le quotidien est devenu méconnaissable. Chaque matin, je peine à trouver l’énergie de me lever. J’ai perdu l’appétit, la mémoire, et la capacité à profiter des moments simples avec mes autres enfants.


La perte d’un être cher, surtout d’un enfant, provoque une isolation. Certains amis ou membres de la famille s’éloignent, incapables de comprendre ou d’affronter la profondeur de notre douleur. La vie reprend pour eux, mais pour nous, elle reste figée à un instant précis, celui où tout a basculé. Cette incompréhension crée un fossé qui peut parfois sembler infranchissable.

Les conséquences physiques et émotionnelles de cette perte sont lourdes. Outre l’isolement social, le corps souffre aussi. Dans mon cas, les traitements ont provoqué une prise de poids et un épuisement général. C’est une souffrance constante, amplifiée par le sentiment que personne ne peut vraiment comprendre ce que nous vivons.


Pourquoi se faire aider ?


Face à cette douleur, il est essentiel de comprendre que nous ne sommes pas seuls et que des aides existent. Dès les premiers jours après le drame, un psychiatre m’a parlé de stress post-traumatique et de la nécessité d’un accompagnement. Mais il faut aussi souligner l’importance de bien choisir le professionnel qui va nous accompagner. Tous les psychologues ou psychiatres ne sont pas formés pour traiter les traumas complexes.

Les associations comme France Victimes et la FENVAC jouent un rôle clé dans cet accompagnement. Ces organisations permettent de trouver des professionnels spécialisés en psychotraumatologie, des experts formés à écouter et accompagner les victimes de drames collectifs ou individuels. Chaque département dispose d’une antenne France Victimes, où des conseillers peuvent orienter les familles vers des psychologues qualifiés.

Ces associations offrent également une aide juridique précieuse. En se rendant dans le tribunal de son département, il est possible de rencontrer des représentants de France Victimes qui peuvent expliquer les démarches légales, accompagner dans les procès, ou simplement répondre aux nombreuses questions qui surgissent après un drame.


Les bénéfices d’une aide adaptée


L’aide psychologique ne fait pas disparaître la douleur, mais elle offre un espace de parole et de compréhension. Pour moi, les séances avec une psychologue spécialisée dans les traumatismes des sapeurs-pompiers ont été une bouée de sauvetage. Elle comprenait mon passé de pompier, les visions, les odeurs, et cette douleur viscérale que je ne savais pas exprimer.

Rejoindre la FENVAC m’a aussi permis de participer à des groupes de parole avec d’autres parents ayant perdu un enfant. Ces rencontres, bien que difficiles, sont d’une grande importance. Lorsque l’on échange avec quelqu’un qui a traversé une épreuve similaire, il n’y a pas besoin de se justifier ou d’entendre des phrases maladroites comme « ça ira mieux avec le temps. » Ces groupes permettent de se sentir moins seul, de trouver des conseils pratiques, et parfois, simplement de poser des mots sur l’indicible.


Les proches face au drame : des réactions différentes


Un drame bouleverse toute la famille, mais chacun réagit différemment. Dans mon cas, ma fille aînée, qui avait 6 ans à l’époque, a aussi souffert de cette perte. Aujourd’hui âgée de 13 ans, elle continue de porter le poids de cette absence. Les enfants, tout comme les adultes, ont besoin d’un soutien adapté. Là encore, les associations peuvent orienter vers des professionnels capables d’aider les plus jeunes.


Cependant, il est difficile de convaincre tout le monde de chercher de l’aide. Certains proches pensent pouvoir tout affronter seuls ou minimisent leur propre douleur. C’est une réalité fréquente dans les familles touchées par un drame : chacun avance à son rythme, mais cela peut aussi créer des tensions ou des incompréhensions.


Conseils pour d’autres victimes : demander de l’aide


Pour tous ceux qui traversent un drame, mon conseil principal est de ne pas hésiter à demander de l’aide, et surtout, de ne pas attendre. La douleur ne disparaît pas seule, et même si l’on pense être fort, un accompagnement peut éviter de sombrer davantage.

Il existe de nombreuses ressources :


  • Les antennes de France Victimes, accessibles dans chaque département, qui offrent un soutien psychologique, social, et juridique.

  • Les groupes de parole organisés par des associations comme la FENVAC, où les victimes peuvent partager leurs expériences.

  • Les professionnels en psychotraumatologie, que ces associations peuvent vous aider à trouver.


L’important est de comprendre que chaque personne vit son deuil différemment. Certains ont besoin d’aide immédiatement, d’autres après des mois ou des années. Il n’y a pas de règle, mais il faut savoir s’écouter et chercher du soutien au bon moment.


L’espoir malgré tout


Mon espoir aujourd’hui réside dans le combat que je mène à travers mon association. En travaillant avec des organisations comme la délégation interministérielle à l’aide aux victimes, j’espère contribuer à améliorer la prise en charge des familles touchées par un drame. L’annonce de la perte d’un proche, par exemple, est encore trop souvent faite de manière brutale et inhumaine. Nous devons faire mieux.


Ce combat est une manière de donner du sens à l’insoutenable, de continuer à me battre pour mon fils et pour tous ceux qui vivent des épreuves similaires.


Conclusion : un chemin unique mais partagé

Chaque drame est unique, mais il existe des points communs dans les douleurs et les épreuves que nous traversons. L’aide psychologique, les associations de soutien, et les groupes de parole ne résolvent pas tout, mais ils sont des ressources indispensables pour avancer.

À travers ce témoignage, j’espère montrer qu’il est possible de continuer, pas seul, mais accompagné par des professionnels et des personnes qui comprennent vraiment.


Pourquoi se faire aider psychologiquement à la suite d’un drame ?

L’importance des associations de victimes


À chaque drame, un désespoir surgit, accompagné d’une incompréhension profonde, d’un sentiment d’injustice, de colère, et d’un éventail d’émotions complexes. Dans ces moments-là, nous nous retrouvons souvent seuls, sans savoir quoi faire ni vers qui nous tourner. C’est ici que les associations jouent un rôle crucial. Pourtant, beaucoup ignorent leur existence ou leur mission.

Les préfectures et mairies devraient orienter systématiquement les victimes vers ces structures, mais cela reste rare, notamment lors de drames isolés. Heureusement, des organisations comme France Victimes ou la FENVAC sont là pour offrir leur soutien.


  • France Victimes est une association présente dans chaque département via des antennes locales. Elle propose une aide psychologique, un accompagnement juridique, et une orientation vers des professionnels formés au psycho-trauma. En cas de besoin, il suffit de chercher France Victimes en ligne pour trouver les antennes les plus proches. Ces équipes prennent en charge des situations variées : violences conjugales, agressions, traumatismes familiaux, ou encore le deuil lié à la perte d’un enfant.



  • La FENVAC (Fédération nationale des victimes d’accidents collectifs et d’attentats) accompagne les victimes de drames collectifs ou d’attentats. Son rôle est similaire, mais elle se concentre sur des situations impliquant de nombreuses victimes, comme des accidents graves ou des catastrophes naturelles. Cette fédération propose un soutien juridique, une aide psychologique spécialisée, et un accompagnement dans les démarches complexes liées aux drames collectifs.


  • Enfin, la Délégation interministérielle à l’aide aux victimes coordonne les actions de l’État pour améliorer la prise en charge des victimes sur tout le territoire. Leur mission est de garantir que chacun, peu importe son lieu de résidence, puisse bénéficier d’un accompagnement adapté.


Ces associations ne se contentent pas d’écouter ; elles agissent. Elles vous orientent vers les bonnes ressources, vous offrent un soutien dans vos démarches administratives et judiciaires, et surtout, elles vous rappellent que vous n’êtes pas seuls dans cette épreuve.


Les étapes du deuil : un chemin complexe


Le deuil est une montagne émotionnelle à gravir, et bien qu’il soit unique à chacun, il existe des étapes communes :

  • Le choc : C’est l’annonce du drame, ce moment où tout bascule. Le sol semble se dérober sous nos pieds. Pour moi, ce fut le moment où j’ai appris la perte de mon fils. Rien n’a plus de sens, et l’on agit souvent en pilote automatique.

  • Le déni : Une partie de nous refuse de croire à la réalité. Pendant longtemps, j’ai attendu mon fils devant la porte, comme s’il allait rentrer. Je me disais que tout cela n’était qu’un cauchemar. Même après des années, cette phase peut parfois refaire surface.

  • La colère : Cette émotion arrive souvent avec force. Elle peut être dirigée contre les autres, contre soi-même, ou contre les circonstances. Pour moi, elle est toujours présente, alimentée par l’injustice du drame que j’ai vécu.

  • La tristesse : Lorsque la réalité s’impose, la tristesse prend une place immense. Elle s’est installée chez moi après l’enterrement, lorsque je suis rentré dans une maison où il manquait quelqu’un. Depuis, elle ne m’a jamais quitté.

  • L’acceptation : Cette étape est censée marquer la fin du processus de deuil, un moment où l’on apprend à vivre avec la perte. Mais pour certains, comme moi, cette phase semble inatteignable. Après sept ans, je n’accepte toujours pas la disparition de mon fils.


Comprendre ces étapes ne rend pas le deuil plus facile, mais cela peut aider à normaliser ce que l’on ressent.


Chacun avance à son rythme, et il est essentiel de respecter ce processus.


Se reconstruire avec de l’aide


Les associations et les professionnels spécialisés dans le psycho-trauma sont indispensables pour avancer. Bien choisir son accompagnement est crucial. Les psychologues et psychiatres formés au trauma comprennent les mécanismes spécifiques liés aux événements tragiques. Les associations comme France Victimes ou la FENVAC disposent de listes de professionnels spécialisés, ce qui peut faciliter la recherche.


Dans certains cas, des groupes de parole peuvent être une aide précieuse. Ces espaces permettent de rencontrer d’autres victimes, de partager ses ressentis, et de se sentir compris sans jugement. La FENVAC, par exemple, organise régulièrement des ateliers et des discussions sur des thématiques comme la perte d’un enfant ou le processus judiciaire.


Un espoir pour les autres


Mon espoir personnel est limité. Mais à travers l’association que j’ai créée, je souhaite contribuer à améliorer la prise en charge des victimes, qu’il s’agisse des annonces souvent maladroites ou du suivi à long terme. Chaque drame est unique, et pourtant, nous partageons tous le besoin d’être compris et accompagnés.


Il est essentiel de demander de l’aide. C’est un premier pas difficile, mais vital. Ces structures sont là pour vous épauler, peu importe le temps que cela prend. Le chemin est long, mais il ne doit pas être parcouru seul.


4 vues0 commentaire

Comments


bottom of page